SHAO Société Historique et Archéologique de l\'Orne

Conférence du 17 mars 2018 - Archéologie préventive récente à Sées (Orne)

Le 17 mars, en préambule de l'assemblée générale de la SHAO, se tenait la traditionnelle conférence liée à l'archéologie.

Hélène Dupont et Bastien Simier. archéologues de l'INRAP sont venus évoquer les dernières opérations archéologiques de Sées.

 

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En mai 2014, Hélène Dupont archéologue à l'INRAP a effectué un diagnostic archéologique à Sées. Elle a réalisé plusieurs sondages dans le jardin nord du palais d'Argentré, siège de l'ancien évêché, situé au pied du chevet de la cathédrale Notre-Dame.

D’après les investigations archéologiques et les découvertes effectuées depuis le XIXe siècle à Sées, la cathédrale et le jardin d’Argentré, au Moyen Âge, se situeraient au cœur de la cité antique. Le diagnostic a confirmé en tous cas la forte présence d’une occupation datable du Haut-Empire à l’est de la cathédrale, avec une prédominance chronologique au IIe siècle. L’arasement des éventuels niveaux du Bas-Empire et de l'époque médiévale est antérieur au XIVe siècle, période pendant laquelle un cimetière, sans doute utilisé par les chanoines du chapitre, est créé autour du chœur de la cathédrale. La reconstruction de cette dernière au XIIIe siècle a probablement arasé une partie des niveaux antérieurs éventuels autour du chœur. Enfin, vers 1775,l’architecte J. Brousseau décape les sols extérieurs du chœur d’environ 50 cm, ce qui correspond aux niveaux antérieurs au XVIIIe siècle à cet endroit.

 

Séchoir Gallo-romain rue de Ardrillers  -    

 

séchoir gallo-romain rue des Ardrillers (1).JPG

 

 

En réalité, l’occupation antique est avant tout caractérisée ici par des niveaux de voies et de sols probablement extérieurs. Les niveaux d’occupation comprennent des niveaux de sols, des dépotoirs, un petit édicule sur solin de pierre calcaire, une portion de mur en grès et enfin, une portion de mur en moellons calcaires liés au mortier. Aucun bâtiment d’ampleur n’a été décelé lors du diagnostic mais rappelons que l’évaluation consistait à s’arrêter sur les premiers niveaux d’occupation de type sol ou structures rencontrés lors du décapage : d’éventuels traces de structures bâties ou leur fantôme restent peut-être à découvrir dans et entre les tranchées des sondages.

L’occupation médiévale est caractérisée par le cimetière des XIVe-XVe siècles (et postérieur ?) et par les remblais de terrasse de la deuxième moitié du XVe ou du début du XVIe siècle. La parcelle appartient à l’évêque mais est mise en valeur par les chanoines. Le secteur, qui appartient au bourg épiscopal (Bourg-l’évêque) dont le territoire se situe autour de la cathédrale et du chapitre est protégé pendant la Guerre de Cent Ans par un mur d’enceinte (Fort Saint-Gervais) retrouvé au sud de la cathédrale et potentiellement présent dans l’emprise du présent diagnostic. Force est de constater que la trace d’un mur d’enceinte de la deuxième moitié du XIVe siècle n’a pas été retrouvée, mais la création de la terrasse qui correspond à son emprise actuelle et au tracé de la rue Amesland n'est peut-être pas étrangère au démantèlement du fort Saint-Gervais, au milieu du XVe siècle.

L’occupation moderne concerne principalement des aménagements sans doute liés à la mise en valeur du jardin de l’évêque d’Argentré et au confort du palais. Il s’agit de canalisations en pierres calcaires et des massifs dont la fonction n’a pas encore été expliquée à ce jour. Une glacière maçonnée, inconnue jusqu’alors, a été découverte au pied du chœur de la cathédrale, ainsi bien protégée et orientée vers le nord.

Enfin, l’occupation du palais par l'armée allemande (Orstkommandantur) à partir de 1941 puis par les américains à partir d'août 1944 est perceptible grâce à deux fosses dépotoirs dont le mobiliers militaires et civils nous renseignent sur le quotidien des militaires.

Plus au nord, Rue des Ardrillers, Bastien Simier, également archéologue à l'INRAP, est intervenu en 2015 pour effectuer une fouille préalablement à la construction d'un bâtiment dans une parcelle appartenant au groupe scolaire Marie-Immaculée.

Une occupation gallo-romaine bien conservée s'organise autour d'un axe de circulation nord-sud (cardo) dont 5 états successifs ont été identifiés. La phase initiale remonte à la création de la cité antique vers les années 30-50 de notre ère ; elle est représentée par un bâtiment de terre et de bois avec sol bétonné. Pendant la seconde moitié du 1er siècle, de nouveaux aménagements s'implantent à l'est de la voirie : une cour délimitée par un mur ainsi que plusieurs fours sans doute liés à une activité artisanale. Le quartier évolue au IIe siècle avec de nouvelles constructions en matériaux légers à l'ouest de la voie ainsi qu'un séchoir à grains (?). Dans la seconde moitié du IIe siècle, le secteur est remanié avec l'arasement complet des constructions antérieures. Seul le cardo est conservé ; un mur soigneusement appareillé semble délimiter l'emprise d'un bâtiment public ou d'une domus avec décors d'enduits peints.

L'occupation gallo-romaine cesse à la fin du IIe ou au début du IIIe siècle et ne réapparaîtra que pendant le Haut Moyen Âge sous la forme d'un cimetière. Les squelettes ont été étudiés par l'anthropologue Raphaëlle Lefebvre : la population inhumée est apparue en mauvais état sanitaire - y compris les enfants – avec des pathologies osseuses dues à des carences alimentaires, à des symptômes infectieux et à des fractures.

 

 Cimetière médiéval rue des Ardrillers.

 

 

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Texte de synthèse : Guy LECLERC.

 

 

Prochaine conférence : samedi 14 avril 2018  par Jean-Claude Gélineau

« La protection des œuvres d'art pendant les conflits armés à l'époque contemporaine - Situation générale et exemples normands. »



21/03/2018
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