SHAO Société Historique et Archéologique de l\'Orne

Conférence de Yves ROTH, le samedi 9 février 2019 : « Le monastère de Soligny-la-Trappe, XVIIe - XXe siècles, agriculture et nourriture ».

Conférence de Yves ROTH :

« Le monastère de Soligny-la-Trappe, 

XVIIe - XIXe siècles, agriculture et nourriture ».

 

Pour le bonheur des sociétaires de la SHAO et du public alençonnais, Yves Roth avait accepté de présenter de manière plus étendue, la communication qu’il avait faite en octobre dernier lors du congrès de la Fédération des sociétés historiques et archéologiques de Normandie à Alençon. Le thème du congrès « De la fourche à la fourchette, pour une histoire normande de l’alimentation » avait suscité plusieurs communications se rapportant à l’alimentation des religieux ou à leurs productions culinaires. Yves Roth avait choisi de s’intéresser à un établissement bien ornais : la Grande Trappe, à Soligny-la-Trappe. Dans un ordre où la règle est réputée très dure, comment s’alimentaient les moines ?

 

 

 

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Yves ROTH      -      Odile LECONTE, Yves ROTH et Frère PAUL de la Trappe

 

 

 

Yves Roth a dans un premier temps rappelé que la Trappe fait partie de l’Ordre cistercien ; mais l’arrivée de l’Abbé de Rancé au XVIIe siècle a conduit à une réforme en profondeur de la vie monastique dans cet ordre, au point que la nouvelle règle, extrêmement austère, fera pourtant des adeptes.

 

La personne de l’abbé de Rancé, de son nom Armand Jean Le Bouthillier de Rancé est assez exceptionnelle : Issu d’une riche famille de la noblesse de robe parisienne, il se trouve à onze ans abbé commendataire de cinq abbayes, dont il perçoit les revenus, mais avec lesquelles il n’a pas de rapports. Ce mondain, après de brillantes études en Sorbonne, finit sur le tard par se rapprocher de l’Eglise et se convertit. Il reçoit la prêtrise, puis fasciné par les Pères du Désert dont il traduit les œuvres du grec, il s’intéresse au Monastère de La Trappe, l’une des cinq abbayes dont il avait hérité. Après un an de noviciat à l’abbaye de Perseigne, récemment réformée, il s’installe à La Trappe qu’il trouve dans une ruine aussi bien matérielle que spirituelle. Pour revenir à la fidélité à la règle de Saint-Benoit et des fondateurs de Citeaux, il met tout en œuvre pour amener (difficilement) ses moines à une vie de prière, d’abstinence et de travail quotidien. Il vend ses biens, renonce à ses autres Bénéfices et impose une vie prônant le renoncement à soi-même, l’humilité et l’ascèse. Si une telle vie s’obtient par le silence, la vie communautaire et un dur travail agricole, l’alimentation est encore une autre façon d’y arriver : se priver de (presque) tout pour élever son esprit.

 

 

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 Robert CHEVALLIER, et Frère PAUL de la Trappe, à la tribune


 

Yves Roth, à partir de nombreux témoignages de l’époque et d’autres plus tardifs, nous montre comment cette règle austère de « L’étroite observance »  ou « Stricte observance », s’est traduite dans l’alimentation des moines : le nombre de repas quotidiens, réduits au strict minimum pour ne pas mourir de faim (deux repas par jour dans le meilleur des cas), les menus dont toute viande est bannie, ainsi que le sucre, les pâtisseries, les matières grasses telles que beurre, huile, crème. Seuls du sel et de l’eau accompagnent des repas d’« herbes » (salades et feuillages divers) et de « racines » (toute plantes poussant dans le sol). Les repas sont peu variés et les aliments produits sur l’abbaye.

 

Au cours du temps, ces règles alimentaires se sont parfois assouplies, selon les circonstances (maladies, guerres, établissements) mais elles sont encore de mise aujourd’hui : s’alimenter sans excès et sans douceurs.

 

 

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L'auditoire - Frère PAUL

 

 

Les nombreuses questions posées par le public à Yves Roth et au Frère Paul, Prieur de La Trappe qui avait assisté à la conférence et a bien voulu répondre, ont montré l’intérêt du public pour les modalités de cette vie communautaire dans un monastère de 22 moines, qui reçoit aujourd’hui du public. Elles ont porté sur les repas, les produits consommés et la façon de les préparer, la façon de les consommer ; mais aussi les vocations, la technologie et les moines, la place de l’agriculture, les occupations des moines ; un retour a été fait sur le fondateur de la règle en replaçant la réforme de l’Abbé de Rancé dans le XVIIe siècle où il a vécu et une société où règles et observances étaient normales et acceptées de tous : étiquette de la cour et règlements des moines. Un parallèle entre les chartreux et les trappistes a été fait.

 

La meilleure preuve du succès de la réforme de l’Abbé de Rancé et de son idéal monastique est que sa règle est encore suivie aujourd’hui chez tous les trappistes, même si d’une abbaye à l’autre, des usages différents peuvent être observés.

 

 

 

Odile Leconte

 

 

 

PROCHAINE CONFÉRENCE : Samedi 9 mars 2019 à 14h30

avec Yannick ROSE : 

 

« Alençon ville médiévale : une enceinte urbaine entre histoire et archéologie »

 

 

                    Et à 16h30 : Assemblée générale  de la SHAO : Venez nombreux!!



11/02/2019
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