SHAO Société Historique et Archéologique de l\'Orne

La Vallée de la Risle était la destination de la sortie annuelle de la SHAO. Robert Chevallier avait concocté un programme articulé essentiellement autour du patrimoine industriel situé sur la Risle, autour de l'Aigle. Une vingtaine de sociétaires avaient répondu présents pour cette journée passionnante et ensoleillée.

Ce fut tout d'abord la Grosse Forge située à Aube. Aujourd'hui, c'est un des établissements métallurgiques les mieux conservé d'Europe ayant gardé l'ensemble de son outillage : foyers d'affinerie, foyer de chaufferie et marteau hydraulique pourvu de sa roue. À côté des logements ouvriers et des ateliers annexes, le bâtiment de l'affinerie donne un frappant témoignage du lieu où s'exerça pendant plus de trois siècles le travail du fer. Le système hydraulique avec ses deux coursiers (canal de travail où se situent les roues ou turbines) est remarquablement bien conservé avec une des deux roues à aubes encore en fonctionnement. Christine Rodriguez et Bernard Rivry n'ont pas manqué d'expliquer le fonctionnement de ce site et de nous faire visiter les salles muséographiques qui comportent, entre autres, de nombreuses maquettes très explicites.

 Pour clore la matinée, le groupe se transportait au musée vivant de l'énergie implanté à Rai dans une authentique usine de 1916 qui emboutissait à chaud les métaux cuivreux (autrefois situé à Chandai). Quel étonnant  musée, porté à bout de bras par Philippe Lecleuyou, qui n'en manque d'ailleurs pas...d'énergie ! Ce site évoque les énergies utilisées de 1800 à 1950 (diesel, vapeur, gazogène, essence) dans les petites et grandes entreprises en présentant d'innombrables moteurs industriels, agricoles ainsi que des machines à vapeur restaurées, remis dans un environnement proche de l'origine, le tout en fonctionnement.

Après un sympathique repas pris à l'Aigle, le groupe se dirigea alors vers l'usine Bohin à Saint-Sulpice-sur-Risle. Ce fleuron du patrimoine ornais doit sa réputation à la fabrication, unique en Europe, des aiguilles et des épingles nourrice. En 1833, Benjamin Bohin crée le site historique de

l'entreprise Bohin à L'aigle. Celle-ci déménage à Saint-Sulpice-sur-Risle en 1866 suite à l'achat une usine, dont les superbes bâtiments existent toujours. Celle-ci comprend une fonderie, une tréfilerie de cuivre, une fabrication d'aiguilles à usage domestique (couture, broderie, etc.).

Cette usine va prospérer à la fin du XIX^e-début XX^e siècle et compter jusqu'à 300 employés. Les nouveaux modes de vie réduisant l'usage d'épingles, leur production va lentement péricliter. Une nouvelle structuration fin XX^e siècle permet de sauvegarder ce savoir-faire unique sur des machines parfois d'origine, et même d'ouvrir au public à partir de 2014. En 2018, Audrey et Fabien Reynier sont à la tête de cette dynamique entreprise, qui produit encore des aiguilles vendues dans le monde entier.

Le processus de fabrication d'une aiguille ne comporte pas moins de 27 étapes explicitées tout au long du parcours de visite, du choix du fil métallique (1) et du dressage, coupe du tronçon et empointage (2) jusqu'au piquage (26) et enfin mise en pochette (27).

Enfin la journée se termina par l'étonnante église de Saint-Sulpice-sur-Risle située à proximité de l'usine Bohin. Elle jouxte un prieuré attesté au XI^e siècle, transformé au fil des siècles et présentant des fenêtres style renaissance ajoutées à l'édifice par Benjamin Bohin.

L'église comporte trois parties distinctes, difficilement identifiables au premier coup d'œil : 1) une première partie, l'église paroissiale, construite au XII^e-XIII^e siècles sur les bases d'une chapelle funéraire de seigneurs de l'Aigle, dont l'élévation des murs se rapporte au XI^e siècle. Sur cette partie se dresse en élégant clocher à base quadrangulaire et se terminant en flèche 2) une partir centrale, point de raccord entre les parties 1 et 3, comprenant un chœur placé dans l'église et une sacristie, et enfin le 3) la chapelle prieurale, d'origine médiévale.

L'intérieur de l'église présente notamment, une belle charpente base de la tour-clocher, des décors peints médiévaux, récemment redécouverts, deux fenêtres avec des vitraux du début du XIII^e siècle représentant pour l'un, Saint-Sulpice, une pierre tombale du XIII^e siècle et  une tapisserie du XVI^e siècle. Une belle découverte...